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 Pierre de Châteauneuf (conte de Provence)

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Béa
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Béa


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Pierre de Châteauneuf (conte de Provence) Empty
MessageSujet: Pierre de Châteauneuf (conte de Provence)   Pierre de Châteauneuf (conte de Provence) EmptyDim 17 Aoû - 14:51

sun La Provence couleur de miel, parfum de lavande, chantante et dansante au ryhtme des ciagles nous rapporte bien des légendes.
Des fabuleuse, des caucasses, des mystérieuses, envoûtantes, et surtout... avec beaucoup de charme et de poésie.

Voici la légende de "Pierre de Chateauneuf", troubadour,
ou "le chateau d'amour"

********
Sur notre terre, petits, la musique et les paroles des chansons sont presque aussi essentielles à la vie que le boire et le manger. Elles peuvent même accomplir des prodiges, comme ce fut le cas, un jour, sur la route qui menait à Romanin, vers un certain château d'amour...

Dans ce château d'amour, vivaient des dames de haute noblesse qui s'adonnaient aux plaisirs des arts et de la courtoisie. Sous les voûtes des plafonds, résonnaient les voix des baladins et les accords de leurs luths. Sur les pavés, glissaient agilement les chausses des danseurs et des acrobates. Dans les chambres, se chuchotaient les strophes des poèmes galants...
C'est en rentrant de Terre sainte, où il avait mené croisade contre les
Infidèles, que le seigneur de Mollégès, Pierre de Châteauneuf, entendit parler de ce lieu et des belles qui y régnaient avec grâce et délicatesse. Leurs noms mêmes le faisaient rêver : Alasacie, Ysoarde, Béatrix, Stéphanette...
Et, pour elles, il composait déjà, dans les nombreuses cours où il était invité depuis son retour en Provence, des chansons d'aube, des ballades et des pastourelles, qui faisaient se pâmer les guerriers, les écuyers ou les pages, presque autant que la gent féminine.

Son renom de poète atteignit le château d'amour et les oreilles fines des dames qui l'habitaient. Par les marchands et les saltimbanques qui sillonnaient les routes de la province, elles lui firent alors savoir qu'il serait le bienvenu entre leurs murs, où elles l'attendaient avec impatience et curiosité.
Flatté et curieux, lui aussi, de rencontrer ces femmes dont tout le monde vantait la sensibilité, le charme et l'intelligence, le vaillant homme se rendit à leur invitation et, grimpant sur son destrier, portant son luth en bandoulière, il s'en fut par monts et vallées vers ce château plein de délices.

Au cours de son voyage, il atteignit, dans les Alpilles, une forêt de chênes
d'une telle épaisseur que la lumière avait du mal à filtrer entre les branches touffues. Hormis les pas de son cheval, qui sonnaient sourdement sur la terre comme les battements d'un coeur, pas un bruit ne provenait des fourrés, comme si les oiseaux avaient cessé de chanter, les feuillages de frissonner, la brise de respirer...
La nature entière retenait son souffle devant l'imminence d'un danger imprécis. Mais, lorsque l'on a combattu de l'autre côté des mers durant
de longues années, on ne se laisse pas impressionner par un silence, fût-il dans la forêt la plus dense, poussant sur les pentes les plus escarpées que l'on ait jamais vues !
Aussi, Pierre de Châteauneuf continua-t-il son chemin en fredonnant un refrain qu'il composait à l'intention de la comtesse de Provence.

Tout à coup, une horde hurlante et menaçante surgit des buissons.
Une dizaine de brigands, hirsutes, armés jusqu'aux dents, lui barrèrent la route. Le cheval du voyageur se cabra. Mais il en fallait davantage pour désarçonner un cavalier aussi chevronné. Alors, l'un des bandits attrapa la bride et tira sur le mors.
Hennissant de douleur, l'animal bondit, rua et se cabra encore... Son maître, habitué à de plus rudes chevauchées, demeura tout de même en selle. Aussi fallut-il qu'un autre des voleurs s'accrochât à sa jambe pour le faire tomber.
Sitôt à terre le seigneur fut assailli de coups de poings et de pieds. Etouffé
par le poids de ses ennemis, il fut obligé de se rendre et de se soumettre à leur volonté. Sans scrupules, ils le dépouillèrent de sa bourse où tintaient pièces d'or et d'argent. Ils lui arrachèrent son luth, dont ils ne savaient trop quoi faire, mais qu'ils se proposaient de vendre à quelque marchand ambulant.

Enfin, ils lui ôtèrent ses habits, qu'ils trouvaient fort à leur goût.
Nu comme un ver, le preux chevalier comprit que sa dernière heure arrivait lorsqu'il vit luire les poignards entre les mains de ses agresseurs.
- Ai-je traversé indemne tant de batailles, échappé à tant de dangers dans de lointaines contrées, pour mourir sur la terre qui m'a vu naître, une chanson aux lèvres ? se dit-il avec une certaine mélancolie.

Les lames se dressaient déjà au-dessus de sa poitrine, quand une idée lui
traversa l'esprit :
- Attendez ! cria-t-il, je suis un chevalier mais, chevalier poète, je désire
affronter la mort en chantant une dernière fois, afin d'entrer au ciel sur
quelques rimes bien tournées et sur un air bien cadencé...
Suspendant leur geste, les brigands se consultèrent du regard. N'ayant jamais ouï de leur vie le son d'un luth, plusieurs d'entre eux étaient curieux d'en écouter quelques accords. Et, puisqu'il ne s'agissait que de différer le sort de leur victime le temps d'un refrain, ils accédèrent à son ultime voeu.
On rendit son instrument au seigneur et on fit cercle autour de lui pour l'entendre autant que pour le surveiller.
Aux premières vibrations des cordes, les feuillages de la forêt se remirent à frissonner et la brise à soupirer d'aise. Aux premières notes dans la gorge du chanteur, les oiseaux se mirent à l'accompagner comme s'ils connaissaient sa Chanson.

Envoûtés, les brigands laissèrent leur prisonnier improviser une
strophe, puis deux, puis trois...
Et le poète, enchaînant les vers, les rythmes et les accords, composa aussi longtemps que son imagination le lui permit une interminable ballade à la gloire de ses agresseurs. Vantant leur force, leur habileté, leur courage et leur goût de la liberté, il flatta leur orgueil autant que leurs oreilles, ponctuant du même refrain les épisodes de son chant. Bientôt, les brigands en apprirent les mots sans cesse répétés et les reprirent en choeur, à pleine voix, en frappant dans leurs mains. A la fin, alors que le chevalier se résignait enfin à mourir sous leurs coups, ils jetèrent leurs poignards pour applaudir avec tant de frénésie que quelques pierres dégringolèrent des pentes des montagnes pour venir se briser contre le tronc des arbres. Sous les ovations, on rendit à Pierre de
Châteauneuf ses vêtements, sa bourse et même sa monture.

Au lieu de s'empresser de se sauver, le chevalier s'adressa à ces coeurs
sauvages qu'il avait émus :
- Pourquoi vivre de meurtres et de pillages alors que le monde est si plein de beauté ? leur demanda-t-il.
- Parce que nous avons faim ! répliquèrent les gueux. La beauté ne nous nourrit guère...
- Venez donc avec moi ! décida le seigneur, troublé à son tour.

C'est ainsi que, sur la route de Romanin, qui menait au château d'amour, on vit arriver, caracolant sur son cheval, Pierre de Châteauneuf, vêtu de son pourpoint de velours, le luth en bandoulière, escorté d'une bande de manants dépenaillés et chantant à tue-tête. Connaissant la fantaisie du chevalier troubadour, les exquises dames ne s'offusquèrent pas de cet étrange équipage.
Elles firent baisser le pont-levis et ouvrir grand les portes de leur château où résonnèrent les sabots, les plaintes du luth et la voix du voyageur, soutenue par celles de ses compagnons.
Ceux-ci firent ripaille jusque tard dans la nuit...

On dit qu'au matin, certains d'entre eux rejoignirent les bois le ventre plein, mais que d'autres demeurèrent en ce lieu plein de délices où ils apprirent à danser, à jongler et à pousser la ritournelle pour tout le restant de leur vie.
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